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- Olivier Jauze
- Change management
- 15 juillet 2021
Table des matières
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Le déploiement des nouvelles méthodes de travail (pratiques, rituels, cadre) décrites dans le Cadre et la Boîte à Outils de Continuous Architecture constitue un véritable parcours de transformation. Il n’existe pas de trajectoire unique pour faire évoluer votre entreprise (ou une partie de celle-ci) depuis son état actuel vers l’état cible (ou étoile du nord) que nous recommandons et qui est incarné dans les principes du Manifeste de la Continuous Architecture - édition 1.
Plusieurs manières de démarrer ce parcours :
- Approche Bottom-up : déployer la Continuous Architecture sur un périmètre limité avec un niveau de changement compatible avec la culture de votre organisation actuelle.
- Approche Top-down : concevoir et lancer un changement plus ambitieux sur une unité opérationnelle, avant d’élargir progressivement.
- Approche Organique : un mélange des deux.
L’approche bottom-up permet de tester le terrain et de démontrer des résultats concrets. Une fois l’organisation prête à une transformation plus large, une approche mixte est souvent nécessaire.
Le schéma ci-dessous (issu de la vue “Organisation” du Cadre de Continuous Architecture) peut vous aider à définir le périmètre et le rythme du changement :
Démarrer en bottom-up
L’approche bottom-up commence au niveau des équipes. On évalue d’abord leur autonomie, car chaque équipe a une composition et des compétences spécifiques. L’outil d’évaluation de l’autonomie des équipes a été conçu pour cela.
Puis, expérimentez quelques pratiques de Continuous Architecture sans changer la structure des équipes. Commencez par exemple avec le Registre de Décision d’Architecture (ADR) : outil simple à forte valeur ajoutée car il rend explicites les décisions. Décrivez ensuite votre trajectoire d’architecture via la Piste d’Architecture. Mettez en place des rituels comme la réunion hebdomadaire d’architecture pour créer une zone de dialogue autour de l’architecture.
Si vos équipes sont organisées par projets ou compétences, vous constaterez peut-être un manque de transversalité et trop de dépendances. Il sera alors pertinent d’adopter une approche produit décrite dans la section Organisation.
Le passage vers une organisation réellement agile peut révéler des lacunes en compétences (product owner, praticien agile, etc.). Il est important d’investir dans la formation et l’accompagnement, voire le recrutement.
Enfin, des obstacles peuvent émerger, comme un système de reconnaissance basé sur la production plutôt que sur les résultats utilisateurs. À ce stade, une approche bottom-up atteint ses limites. Il est temps d’impliquer le management et les RH pour initier une transformation plus large.
Démarrer en top-down
L’agilité à l’échelle est difficile car elle implique des changements en profondeur, y compris culturels. Trois grandes banques 1 2 ont adopté un modèle inspiré de Spotify 3 :
- Équipes alignées flux 4 (Squads et Tribes)
- Équipes transverses (Chapters et Guilds)
Chez Fidelity et ING, ce modèle a été déployé de manière top-down, avec un redéploiement des collaborateurs sur les nouveaux rôles.
Mais ce changement d’organisation ne suffit pas. Il faut aussi :
- Repenser les objectifs et la reconnaissance
- Prévoir un plan de (re)montée en compétences
- Faire évoluer la culture, les croyances, le leadership
Exemples :
- Chez Société Générale, l’autonomie alignée était soutenue par un objectif partagé et des OKRs.
- Chez Fidelity, des principes de leadership tels que « dire les choses telles qu’elles sont », « permettre aux autres de décider » ou « assumer le résultat » ont soutenu la transformation.
Si vous cherchez une approche de conduite du changement, les 8 étapes de Kotter 5 peuvent être une bonne base.
Attention toutefois : il est risqué d’adopter un framework de solution sans avoir clarifié les vrais problèmes. Cela s’applique aussi aux cadres comme SAFe, Spotify 6 ou Kotter.
Beaucoup d’organisations copient le modèle Spotify sans :
- Encourager une culture de l’expérimentation
- Traiter la dimension culturelle, pourtant essentielle à la réussite
La Continuous Architecture ne se déploie pas à l’aide d’un modèle top-down rigide. Nous prônons une approche organique, partant des problèmes concrets, associant bottom-up et top-down, et promouvant l’expérimentation continue.
Démarrer en organique
L’approche organique consiste à créer les conditions de l’émergence du changement. On peut commencer par une expérimentation sur des équipes en difficulté (ex. dette technique élevée), souvent plus réceptives.
On utilise alors les outils (ADRs, Runway, rituels…) qui aident l’équipe à progresser. Une fois les premiers résultats obtenus, vous pouvez chercher un soutien organisationnel pour étendre l’approche.
L’idée : ne pas transformer une unité complète, mais plusieurs domaines en parallèle, à leur rythme, selon leurs contraintes.
Exemple Michelin : une transformation organique
Trois ans plus tôt, Michelin constate que l’architecture risque de devenir un goulot d’étranglement dans l’accélération numérique. Il faut évoluer vers un modèle plus collaboratif et soutenable. C’est la naissance de l’initiative de Continuous Architecture, en partenariat avec Glue N’DO.
Les grandes étapes :
- 3 ans : des expérimentations locales à un déploiement global organique
- 5 défis initiaux
- Des catalyseurs : vision partagée, équipe guide, boîte à outils ouverte, modèle évolutif, communauté → Penser grand, agir petit
Phase 1 : Lancement
Des équipes pilotes volontaires ont testé l’approche avec deux objectifs :
- Tester notre MVP (version initiale de la Continuous Architecture)
- Prouver que ça aide les équipes
Ce succès initial a permis de crédibiliser l’approche et d’identifier les freins structurels à lever.
Phase 2 : Déploiement organique
Le Chief Enterprise Architect valide l’approche et demande à chaque domaine de déployer la Continuous Architecture à sa manière.
Même en pleine pandémie (2020–2021), le modèle est étendu, avec des sessions d’onboarding, du coaching et une communauté active.
Les 5 défis initiaux de Michelin
Chaque entreprise a ses propres défis architecturaux. Chez Michelin, les 5 premiers leviers d’action ont été :

- Connecter les points : rompre avec l’architecture descendante, créer une zone de dialogue entre intentionnelle et émergente.
- Continuous : relier l’architecture à un processus logiciel continu (de l’idée à la livraison).
- Voir le système global : fusionner build & run, adopter une approche fullstack, penser l’intégration système.
- (Re)Équilibrer : redonner leur place aux exigences non fonctionnelles (qualité, performance…).
- Les personnes : redéfinir les rôles, former, coacher, développer les compétences avec l’Architecture Kata.
Les catalyseurs du changement
Une vision partagée et une coalition guide
Un système d’information dans un monde VUCA doit être évolutif. Il faut donc des architectures découplées, basées sur des modèles cloud-native, orientés événements, microservices…
Mais la technologie seule ne suffit pas : il faut réinventer le modèle collaboratif, développer l’alignement et l’autonomie, tout en maintenant l’intégrité système.
Une boîte à outils ouverte
Chaque équipe est différente. Chez Glue N’DO, nous avons imaginé le jeu de fléchettes de l’architecture : chaque équipe choisit les pratiques adaptées à son contexte et place ses fléchettes dans le centre (bull’s eye). L’architecte devient un leader-serviteur, aidant l’équipe à viser juste.
Un modèle collaboratif évolutif
Grâce à un kit d’évaluation de l’autonomie, on évalue :
- La maturité de l’équipe
- Les défis architecturaux du produit
Cela permet d’ajuster la gouvernance, le rôle des architectes et d’éviter les ralentissements bureaucratiques.
Une communauté et un réseau
La communauté de Continuous Architecture chez Michelin est locale et globale, animée chaque mois. Grâce à l’initiative open source, elle partage apprentissages et accélère la transformation.
Une approche organique : « Penser grand, agir petit »
Lancer un tel changement nécessite plus qu’une nouvelle méthode. Il faut changer les processus, la culture, les croyances et les comportements.
- Une transformation top-down apporte l’illusion du changement, sans autonomie réelle.
- Une approche bottom-up seule se heurte à des limites.
Recommandation : adoptez une approche organique — comme Michelin.
Penser grand : porter une vision, créer un cadre propice, supprimer les obstacles.
Agir petit : accompagner localement les équipes, à leur rythme, dans leur contexte, en favorisant les opportunités et l’innovation.